Vivre et l'écrire

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Ce que danser veut dire

Il y a des gens comme ça qui vous tombent dessus et qui réussissent à vous saouler en prononçant une simple phrase imbibée d'alcool alors que vous même, vous n'en avez pas bu une seule goutte...

 

Cela faisait longtemps que l'on ne m'avait plus abordé dans le but d'accomplir un acte de charité dont j'aurais été le "bénéficiaire". Cette fois-ci il s'agissait d'un type qui a branché une salsera parce qu'il voulait, m'a-t-il rapporté par la suite, "me faire danser". Pourtant je vous assure que je ne suis pas allé à cette soirée avec un écriteau autour du cou où j'aurais écrit "A vot' bon cœur, faîtes moi danser siouplé !"

 

Me faire danser ? Qu'est ce que ça peut bien vouloir dire ?

 

Je connaissais déjà l'expression "faire chanter quelqu'un", un acte menaçant à ne pas confondre avec l'acte de chanter, bien que si vous chantez aussi mal que moi cette chose anodine en apparence peut s'avérer être en effet une menace redoutable pour les paires d'oreilles qui vous entourent. Alors partant du principe qu'il devait s'agir là aussi d'une menace, je me suis imaginé que "me faire danser" pouvait vouloir dire m'infliger une contredanse. (Oui vous voyez moi aussi, je me mets à réformer la langue française, c'est de saison) Mais il n'était pas flic et moi je n'ai commis aucune infraction au code de la route sur la piste de danse alors que mon fauteuil était, lui, parfaitement en règle vis à vis du contrôle technique. Il ne s'agissait donc pas d'une contredanse.

 

Je n'ai rien contre la danse pourtant et danser contre ma partenaire n'est pas fait pour me déplaire non plus. Par contre je danse avec une partenaire ou bien une partenaire danse avec moi, cela dépend du point de vue, mais on ne me fait pas danser, vous voyez. Tout simplement parce que je ne suis pas un homme-objet que l'on prend, que l'on utilise et que l'on pose quelque part une fois la danse achevée.

 

La danse est un plaisir, et une invitation à danser découle d'une envie. Ni l'un, ni l'autre ne sont des actes de charité. Je n'ai pas besoin de charité, ni de pitié ou de compassion pour danser ni pour autre chose d'ailleurs. Il se trouve que la salsera qui s'est faite aborder avait déjà dansé avec moi avant l'intervention du bonhomme. Aussi surprenant que cela puisse paraître, elle n'a pas eu besoin non plus de faire appel à lui pour danser avec moi. Pas plus qu'elle n'a eu besoin de lui par la suite lorsqu'elle a voulu s'asseoir sur mes genoux. Figurez-vous qu'elle a atteint son objectif sans aucune assistance et même de son plein gré (et sans aucune résistance de ma part).

 

C'est vrai aussi que ce gars était fort bourré. Mais je crois que même dans son cas l'alcool est innocent parce que ce genre de phrase je l'ai déjà entendue plusieurs fois sortir de la bouche de certaines personnes parfaitement sobres. Dans le même registre des répliques élégantes et bourrées de tact (mais toujours sans alcool), quelqu'un m'avait dit un jour "on te sort un peu ?". Une autre avait pris à part un de mes potes pour lui dire que j'avais vachement du courage pour oser sortir dans un lieu public comme celui-là. Je vous précise quand même que le lieu en question était une salle de cinéma ! Et je vous passe toutes les fois où des personnes s'adressent aux gens qui m'accompagnent en m'ignorant superbement pour leur parler de quelque chose qui ME concerne.

 

Toutes ces interventions malheureuses ont un point commun qui n'est pas l'alcool. C'est qu'à force de focaliser leur attention sur mon handicap, certains en oublient cette chose pourtant essentielle : même si je suis bien une personne handicapée, je suis avant tout et surtout un homme. Oui, UN HOMME !

 

Publié sur Facebook le 21/02/16



11/03/2016
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